Chapitres pour les Oblats 1873-1899

      

Conférences, confessions, pénitences

Chapitre du 23 avril 1890

“Dans chaque maison, les Oblats de saint François de Sales se réuniront avec exactitude et dévotion au lieu indiqué par le supérieur, pour les Conférences spirituelles qui se feront au moins une fois la semaine. Ces conférences auront spécialement pour but l'abnégation de sa propre volonté et du propre jugement, l’exercice de l’union à la volonté divine dans toutes ses actions, l’union fraternelle, le zèle de sa propre sanctification, et son avancement dans les vertus qui nous sont recommandées, et surtout le zèle envers les âmes qui font l’objet de nos différentes oeuvres” (Const., Art. XVII:1; p. 62-63).

Les conférences de chaque semaine doivent en effet rouler sur les sujets indiqués là. Qu'on prenne d'abord pour texte de ces conférences, la Règle , le Directoire, afin que tous nos Pères sachent bien ce qu'ils ont à faire à chaque instant. La pratique de la Règle et du Directoire, c'est la pratique de toutes les vertus recommandées dans cet article. Quand on a fini la Règle et le Directoire, on peut prendre expressément l'explication de ces vertus. Toutes ces vertus sont difficiles, mais elles sont bien nécessaires. Je vous recommande de vous y appliquer. Nous sommes au commencement de l'Institut, nous traçons la route. Il faut marcher d'un pas résolu.

“... l'abnégation de la propre volonté et du propre jugement ...” — C'est une vertu très religieuse: c'est une de celles qui doivent être le plus en honneur dans la Congrégation. Sans doute toutes les Congrégations religieuses exigent à peu près les mêmes choses, mais beaucoup d'autres Congrégations ont des moyens extérieurs que nous n'avons pas. Il faut être d'autant plus attaché à la soumission de la volonté et du jugement.

“... l'exercice de l'union à la volonté divine dans toutes ses actions ...” — Je recommande bien cette union à la volonté divine qui se fait surtout par la pratique du Directoire. Il faut que notre recours à Dieu soit continuel, puisque nous avons continuellement besoin de son secours.

“... l'union fraternelle, le zèle de sa propre sanctification ...” — Voilà les sujets des Conférences. Néanmoins quand le supérieur voit quelque chose de particulier à dire concernant l'ordre de la maison, une vertu ou un défaut qui sont en évidence, il peut bien prendre ce sujet particulier, et faire en chapitre les observations qu'il croit bon de faire, les remarques concernant l'obéissance à la Règle, ou au supérieur. Il peut consacrer à cela tout le temps de la réunion de chaque semaine. Mais il ne faudrait pas que le supérieur sortît du programme qui lui est tracé ici, et qu'il se mît à faire des conférences sur l'Ecriture Sainte, sur l'exercice de telle ou telle vertu prise en dehors de celles qui sont marquées, en dehors des vertus de notre Institut. Il faut que chacun se maintienne bien dans notre esprit, autrement il n'aurait plus sa raison d'être au milieu de nous. Un prunier est un prunier, et ne doit pas être un oranger ni un pêcher. Que chacun marche bien dans la voie qui lui est ouverte, afin de bien opérer selon les desseins de Dieu.

Je le répète , il faut que les conférences de chaque semaine roulent sur le Directoire et les Constitutions. Voilà le thème habituel. Accidentellement elles peuvent avoir pour objet la pratique d'une vertu plus particulière, d'une observance. Il ne faut pas sortir de là. Que les conférences sur la vie religieuse soient toujours faites dans le sens de notre vie religieuse à nous, de l'esprit des Oblats. Tenez-vous-y bien fidèlement. Marchez sur ce terrain. Vous n'auriez pas grâce pour autre chose: votre mission, votre juridiction ne va pas ailleurs. Ne dites pas que cela vous met à l'étroit. Au contraire rien n'est plus large et plus grand: vous êtes avec le bon Dieu, puisque l'union à la volonté divine doit être continuelle. Ce ne sont pas les œuvres étroites de l'esprit humain que vous entreprenez , mais l'œuvre de Dieu lui-même.

“Outre les Conférences sur la vie religieuse, il y aura chaque semaine des entretiens sur le dogme, les cas de conscience, les différentes difficultés qui se présentent dans l’exercice du saint ministère. L’enseignement de saint François de Sales sera spécialement suivi dans ces matières, et on adoptera plus particulièrement sa doctrine sur les points qu’il a traités dans ses oeuvres” (Const., Art. XVII:2; p. 63-64).

Nous n'avons pas encore été à même d'observer cet article des Constitutions. Chacun est occupé à droite et à gauche. Ces conférences regardent les œuvres du saint ministère, et nous n'avons pas encore fait grande besogne dans cette voie. Quand nous serons en plus grand nombre, nous pourrons faire cela. De même aussi serait-il bon d'avoir de temps en temps dans les Collèges des conférences sur l'enseignement. Je désire bien que nous devenions assez nombreux pour nous occuper du saint ministère, pour bien diriger les âmes dans l'esprit de notre saint Fondateur. Il a traité toutes les questions théologiques, toutes les questions de la Direction des âmes. Il faut s'en tenir à sa doctrine: elle est certaine, elle est sûre; il n'y a rien à craindre avec elle.

Les âmes que l'on fait entrer dans cette voie, comprennent et marchent. C'est , comme dit la Sainte Eglise, un chemin sûr et facile. Ces conférences seraient donc très utiles, mais elles ne sont guère possibles maintenant. Que d'ici là chacun de nous se pénètre de la doctrine de saint François de Sales pour la prédication, pour la confession, pour la direction des âmes. Etudiez ce qu'a dit la bonne Mère, ce que je vous dis moi-même. N'agissez pas en dehors de ce courant. Comme dit le Directoire: "Pour bon qu'il semble être, et qu'en effet il le fût, si ne le serait-il pas pour nous,” ni pour nous, ni pour les âmes que nous avons à conduire.

“Tous les prêtres devront se confesser deux fois, ou au moins une fois la semaine, à l'un des confesseurs de la maison désignés à cet effet, et non à d’autres, sans la permission du supérieur, et ils devront célébrer tous les jours la Sainte-Messe, et non à d’autres, sans la permission du Supérieur, et ils devront célébrer tous les jours la Sainte-Messe, à moins d’un empêchement” (Const., Art. XVII:3; p. 64).

La direction d'un autre prêtre que les confesseurs désignés ne pourrait pas aboutir à quelque chose de bien. Il ne faut pas être comme les femmes qui ne peuvent pas se confesser à n'importe qui. Nous pouvons nous adresser indifféremment à ceux des Pères de la maison qui sont désignés à cet effet. Pour aller ailleurs, il faut la permission. Il faut sans aucun doute que les consciences restent toujours bien libres. Mais il ne faudrait point prendre l'habitude de se confesser en dehors des prêtres de l'Institut. Voyez ce que recommande la Règle à ce sujet, ce qui est par conséquent la loi de l'Eglise pour nous, le septième commandement de l'Eglise pour nous; et ce commandement a autant de valeur que les autres.

“... célébrer tous les jours la Sainte Messe à moins d'empêchement.” — Si l'on est malade, ou qu'un voyage ne rende pas la chose possible, on peut ne pas célébrer la messe: mais à part cela il n'y faut jamais manquer. Nous priverions nos âmes d'un secours nécessaire; nous priverions les fidèles d'édification, et l'Eglise d'un aide dont elle aussi a grand besoin.

Je reviens à la confession. C'est une obligation pour les Pères de se confesser aux Pères qui sont désignés à cet effet. C'est aussi une obligation pour les frères. Par accident un Frère demande la permission de se confesser ailleurs, le supérieur ne lui demandera pas pourquoi. Il faut, pour la confession, laisser une grande liberté, aux Frères comme aux Pères. Demander la permission, n'est pas une contrainte violente, c'est un acte d'obéissance exigé par l'Eglise, précisément afin de maintenir l'esprit de la Congrégation. Les religieux, les religieuses qui ne veulent pas s'astreindre à se confesser dans leur communauté, qui vont au dehors, tournent mal; ils ont certainement quelque chose de travers dans l'esprit; ils n'ont pas la tête montée tout à fait comme il faut pour vivre en communauté. C'est un vice rédhibitoire.

“Tous pratiqueront chaque semaine un ou plusieurs exercices de pénitence, tels qu'ils se trouvent dans les Constitutions de saint François de Sales. Ces exercices auront le double but d’humilier et de mortifier les Oblats. Les exercices destinés à les humilier se font au réfectoire ou au Chapitre. Les autres se pratiquent en cellule, selon l’avis du Supérieur” (Const., Art. XVII:3; p. 65).

Nous en avons déjà dit un mot. Pour les mortifications du réfectoire, celles qui sont destinées à humilier ne peuvent pas se pratiquer dans les maisons où il n'y a pas de réfectoire de communauté. Les autres se pratiquent en cellule selon l'avis du supérieur. Il ne faut pas être trop douillets sur nous-mêmes. Saint François de Sales pratiquait ces mortifications-là, il couchait sur la dure, il se donnait la discipline. N'oublions pas ce côté-là de sa doctrine. Quand on ne donne rien au bon Dieu de ce côté-là, cela prouve qu'on ne l'aime guère, et qu'on n'est guère religieux. Que chacun y pense bien et fasse son examen.

Si l'on est malade, si l'on est faible, il est certain qu'on ne peut pas pratiquer ces pénitences; le moyen de les remplacer, c'est une grande fidélité à offrir au bon Dieu les souffrances et les misères, à accepter avec résignation la volonté de Dieu. De la sorte on paie sa dette avec des centimes, mais on la paie toujours. Ceux qui peuvent payer en grosse monnaie sont bien plus heureux. Je recommande bien à toute la communauté de ne pas oublier dans les prières, surtout au memento des vivants, toutes les personnes qui se recommandent à nos prières, et elles sont très nombreuses. Comme aussi il faut prier pour nos Pères absents: il faut les soutenir dans leurs épreuves, dans leurs peines, dans leurs tentations, afin que nous formions tous une vraie communauté; non seulement une communauté par le dehors, mais par la volonté et le cœur; cela réjouira le Cœur de Notre-Seigneur.

A Springbock les Francs-Maçons font toujours une guerre violente à nos Pères, à nos Sœurs. Il semble que le diable croie qu'il va remporter la victoire: ceux qui agissent par lui se l'imaginent, et cela accroît leur zèle. Je me rappelle une lettre du Père Simon qui recevait une visite des gens du gouvernement. La conversation tomba sur la religion. L'un dit: “Je suis protestant”. L'autre dit: “Je ne suis rien”. Un troisième: “Je suis de la religion des Francs-Maçons”. La religion des Francs-Maçons? Il faut prier pour eux. A l'Equateur cela va bien. Au Séminaire on est content. La paroisse du Père Soumier est contente de son curé qui a du zèle, qui décore bien son église ; mais il lui faudrait un bon vicaire, qui ne fût pas ivrogne.