Chapitres pour les Oblats 1873-1899

      

La retraite et les missions

Chapitre du 25 février 1885

“Pour les retraites et les missions, on aura soin de ne jamais les accepter que sur la demande expresse des curés et des supérieurs. L’Oblat de Saint François de Sales chargé de cette sorte d’œuvres, devra avant de la commencer, prendre la bénédiction du curé et lui présenter la feuille de pouvoirs qu’il tient de l’Evêque du diocèse. Il ne fera aucune Œuvre sans l’avis et agrément du curé. S’il juge nécessaire d’entreprendre quelque chose d’extérieur, il en parlera à Dieu, dans une oraison et à la Sainte Messe, puis s’en ouvrira au Curé et se conformera à sa décision. Cette entente servira merveilleusement au  succès de sa mission”  (Const., Art., XV:9-10; p. 56-57).

Cet article a son importance. Il arrive souvent que des paroissiens demandent une mission, ils ont besoin d'être renouvelés dans la piété par une voix un peu étrangère. Or les Constitutions nous défendent de les accepter sans le consentement du curé. Il pourrait en résulter plus de mal que de bien. C'est qu'il y a un excès du bien, vouloir faire du bien aux gens malgré eux. Notre-Seigneur ne l'a pas fait. La bonne Mère Marie de Sales disait à ses religieuses: “Mon don à moi, c'est plus de donner Dieu aux âmes que de conduire les âmes à Dieu”. C'est là aussi notre rôle. Notre zèle, notre activité si grande soit-elle, aura toujours son aliment dans le sacrifice que nous ferons de nous-mêmes à Dieu.

“L'Oblat de saint François de Sales, chargé de cette sorte d’œuvre, devra avant de la commencer prendre la bénédiction du curé”. — C'est là un acte essentiellement religieux que Dieu ne manquera pas de bénir et aussi un moyen de travailler de concert avec le curé.

“[L'Oblat de saint François de Sales] ne fera aucune œuvre sans l'avis et l'agrément du curé”. — Il faut en outre une quasi certitude que le bon Dieu continuera la chose, sans cela l’œuvre serait comme un fruit qui se gâte au milieu d'autres fruits. Ce qu’il faut avant tout, c'est faire confesser et communier les gens, car ainsi Dieu visite leurs âmes et c'est là une grande grâce.

“S’il juge nécessaire d’entreprendre quelque chose d’extérieur ...” — Par œuvres extérieures, il faut entendre l'établissement de congrégations, confréries ou œuvres semblables. Il est évident que, pour cela, il faut l'agrément du curé. Nous ne pouvons en effet avoir d'autre influence que celle d’en haut. Nous n'avons que le pouvoir de faire descendre le bon Dieu, mais par nos forces, par notre réputation, nous ne pouvons rien, rien par nous-mêmes. Il faut que nous ne soyons rien: nous ne faisons pas de politique, nous ne nous occupons pas des choses extérieures, nous en laissons le soin à la Providence. Ainsi dans les Missions, dans les œuvres, prenons toujours le petit rôle. Ne disons pas: "L'honneur de l'état religieux... la mission dont nous sommes chargés...”Non, ce rôle n'est pas à nous. Ce rôle de Dieu commencera là où nous finirons et non seulement il commencera, mais il continuera et se perfectionnera.

C'est là notre esprit, notre règle invariable. Quand même notre mission nous appellerait chez des laïques pour des œuvres quelconques, notre grande habilité sera d'aider les autres à faire le bien, même aux dépens de nous-mêmes.  Ainsi, si l’idée des corporations se répand, comme elle semble vouloir le faire, que ces corporations se forment et que nous soyons appelés à y donner notre concours, prions pour qu'on conduise bien les choses; aidons les autres de nos prières, de nos conseils. Puis toutes les fois que les choses ne seront pas comprises à notre manière, nous nous effacerons, imitant Notre-Seigneur dans son esprit et ses actes.

“... puis s'en ouvrira au curé et se conformera à sa décision ...” — Ce qui est dit du curé est dit de tous les supérieurs. Si on fait une retraite dans une communauté, ce qui est quelque chose dans cette communauté, c'est la Règle, ce sont les supérieurs. Il ne faut donc pas vouloir s'emparer des choses aux dépens de la Règle ou des supérieurs. Ce serait un vol, une véritable intrusion. Il en serait de même pour une famille: vouloir y prendre pied, y établir notre autorité aux dépens de celle qui doit s'y exercer, serait tout à fait déplacé, et si nous agissions ainsi, nous serions des misérables. Donc, nous ne devons jamais rien changer, rien déplacer. Notre-Seigneur dit à ses Apôtres. “Vous êtes le sel de la terre” (Mt 5:13), non pas les rois, les délices de la terre, mais le sel de la terre. Le sel conserve la chose dans l'état où la nature où Dieu l'a faite. Nous ne devons pas prétendre autre chose. Nous ne devons pas nous identifier au pouvoir de l'Eglise, nous ne devons qu’être les auxiliaires de l'Eglise. Pour bien comprendre ces choses-là, il faut que Notre-Seigneur le donne à chacun, et c'est en nous conformant à ce qu’on nous recommande que nous l'obtiendrons. On se conformera bien à l’esprit de notre bienheureux Père.

Mgr de Macedo, évêque de Para [Brésil], dit que pour abattre le mur de la franc-maçonnerie, il faut les secours surnaturels, et c'est saint François de Sales qui en indique le mieux les moyens. C'est pourquoi il vient demander des secours à l'œuvre de saint François de Sales et aux Oblats. Car, comme la franc-maçonnerie est la lutte de l'homme, il faut pour la détruire la lutte de Dieu. Demandons bien à notre mère Marie de Sales, qu’elle nous fasse pénétrer dans cet esprit. Ce sont là ses derniers vœux. Et ainsi nous ne sommes pas dans l'Eglise une congrégation inutile.