Chapitres pour les Oblats 1873-1899

      

Vêtements, nourriture, mortifications

Chapitre du 5 mars 1890

“On aura un soin tout particulier de ses habits, des livres, du petit mobilier à son usage, sachant que les pauvres sont plus obligés que les autres à la conservation de ce qui leur est confié” (Const., Art. XX:5; p. 72).

Il faut non seulement mettre du soin à conserver ce qui nous est confié, livres , vêtements, mais aussi de la dévotion, de l'affection. Ce ne sont pas de petites choses que je vous dis là, puisqu'elles entrent dans les conditions de la vie du bon religieux. Sans doute elles sont fort assujettissantes, mais pour nous c'est une obligation de nous y soumettre. Nous devons aussi nous contenter de ce que nous avons, ne rien ajouter à ce qui nous est absolument nécessaire. Nous sommes tenus à la pauvreté comme à l'obéissance et à la chasteté. Aussi faut-il prendre garde de se laisser aller à ses goûts, à ses désirs. Il faut toujours être privé de quelque chose; alors on n'est pas privé de Dieu. Dieu comble le vide qui s'est fait en nous. En visitant la chambre de Don Bosco, je fus frappé de la pauvreté qui y régnait. C'est le même sentiment qui s'empare de l'âme quand on entre à la Visitation: on n'y remarque rien que ce qui est nécessaire. Pour comprendre bien cela, il faut en faire la pratique. Que chacun, cette semaine prenne donc là-dessus de bonnes résolutions, puisque cela entre dans nos obligations, comme pour le Chartreux de coucher sur la dure.

“Dans la nourriture on évitera de se laisser aller à son goût. et à ses inclinations, et on pratiquera la mortification indiquée par les constitutions” (Const., Art. XX:6; p. 72).

Au réfectoire il ne faut jamais oublier la mortification. Si on y manque, il faut réparer cela au repas suivant ou faire une autre pratique de pénitence.

“Les Oblats se souviendront que, devant pratiquer le Directoire spirituel donné par saint François de Sales lui-même, ils n’ont pas le loisir de laisser divaguer leurs pensées sur des choses inutiles et vaines, ni surtout dangereuses, leur conversation devant être céleste et non mondaine, futile et désordonnée” (Const., Art. XX:7; p. 72-73).

Nous n'avons pas le loisir de laisser divaguer notre pensée sur des sujets dangereux, ce qui va de soi; mais même sur des choses inutiles qui n'aboutissent à rien: le Directoire le défend. Il faut être occupé des choses que commande Dieu, des choses qui peuvent nous servir. La pensée fait la vie d'un homme. Si nos pensées sont des pensées d’amour propre, de sensualité, notre vie s'en ressentira. Si nous pensons à Dieu, si nous pensons avec Dieu nous vivrons aussi pour lui et avec lui.

“Ils n'oublieront pas que la gêne qu'ils sont obligés de s'imposer pour pratiquer entièrement nos Constitutions fait partie essentielle des mortifications régulières de la Congrégation et que c'est ainsi que nous suppléons aux jeûnes et aux abstinences de beaucoup de saints ordres religieux, qui édifient l’Eglise par la pénitence de leur vie” (Const., Art. XX:8; p. 73).

Cet assujettissement est une grosse pratique, très gênante. Il est plus facile de faire un instant une grosse mortification, de se donner la discipline que de se donner de perpétuels coups d'épingle. Aussi notre vie n'est-elle ni moins méritoire, ni moins unie à Dieu que celle des autres religieux. L'habitude de se mortifier ainsi soutient la vie. Celui qui reste continuellement assis au coin de son feu prend des crampes dans les jambes, se morfond et s'ennuie; il est plus agréable et plus sain d'escalader une montagne. Le Père Capucin qui présidait la dernière commission chargée de réviser nos Constitutions a trouvé qu'il n'y avait pas assez de pratiques corporelles dans nos Règles et il aurait voulu en ajouter. La sainte Eglise a jugé néanmoins que la mortification dans les petites choses était appréciable et méritoire, puisqu'elle n'a rien modifié, si ce n'est qu'on nous a enjoint de prêcher la pénitence aux autres. Saint François de Sales pratiquait en son particulier de dures pénitences et ces austérités ne le faisaient point se relâcher de sa mortification continuelle. Nous allons donc prendre une bonne résolution de bien observer notre règle, de bien nous y attacher et d'être exactement fidèles à tous les petits assujettissements qu'elle demande de nous. Faisons ainsi notre carême, afin que nous puissions remplir les vues de Dieu sur nous, afin aussi qu'il nous vienne des sujets. Ayons cette intention toute spéciale pendant le carême. Il sera bon que chacun renouvelle chaque matin son intention et ses bonnes résolutions.