Chapitres pour les Oblats 1873-1899

      

La solitude, le Manuel, le Directoire

Chapitre du 1er décembre 1886

“Ils feront chaque année les exercices de la solitude, prescrits par saint François de Sales” (Const., XIX:2; p. 68).

Dans les retraites annuelles, il ne faut pas d'effort violent, parce que la réaction vient ensuite. Notre volonté est comme les corps élastiques, après l'effort en avant, s'il est brusque, vient le retour en arrière. Sans doute Dieu récompense l'effort, mais si cet effort est violent, il a aussi son danger, qu'il y ait effort du côté du cœur ou effort du côté de la volonté. Il faut que nos efforts pendant la retraite aillent plutôt vers Dieu que vers nous. Faisons effort pour pratiquer d'abord l'exercice de la présence de Dieu qui est recommandé en premier lieu. Tout est là pour nous, nous l'avons dit souvent.

Effort pour mieux faire l'oraison. Consultons notre directeur: s'il y a quelque chose à modifier dans la manière dont nous la faisons, il nous le dira. Pendant la retraite, faites vos oraisons comme pendant le reste de l'année. Sans doute il faut méditer les grandes vérités. Notre saint Fondateur le fait faire, mais ce n'est pas une règle générale. Qu'en retraite comme toujours notre oraison soit une conversation intime avec Dieu.

Nous ferons soigneusement nos examens: nous nous rendrons compte de ce que Dieu nous reproche. La retraite a toujours, l’expérience le prouve, une portée immense sur l'âme qui en fait tous les exercices exactement comme il est recommandé de les faire, sans grands efforts, et même il arrive qu'on soit sans sentiments. Ce que nous n'aurons pas eu pendant la retraite, nous le retrouverons dans le cours de l'année. Voilà comment il faut faire la retraite, et comment il faut la faire faire aux autres. Il faut avoir égard aux différentes natures, aux différents esprits. Il faut s'occuper pendant la retraite autant qu'il est nécessaire, mais il ne faut pas trop compter sur le travail de l'esprit. C'est excellent d'occuper son esprit de bonnes choses, mais il faut se tenir surtout dans le recueillement, la docilité et 1'union à Dieu, qui est le grand directeur des âmes.

“On ne pourra, pendant ces solitudes, prendre aucune direction étrangère et s’il était utile à quelques Oblats de recourir au dehors pour la confession, ils le feraient en un autre temps; ou s’il était nécessaire qu’ils le fissent pour leur solitude, il serait du devoir des Supérieurs de choisir ou d’indiquer les prêtres, dont l’esprit se rapprocherait le plus de notre manière de vivre et de juger dans les choses spirituelles” (Const., Art., XIX:3; p. 68-69).

Si cette direction [étrangère], par extraordinaire, était jugée nécessaire, il la faudrait prendre pendant un autre temps. Ceci est un point extrêmement important. Dans les communautés religieuses on ferait bien de faire ses retraites à part soi. C'est le temps des provisions. On ferait bien de faire ses retraites suivant les besoins, les aptitudes, les emplois de l'Institut. La meilleure manière pour les Oblats de faire la retraite, c'est de la faire entre eux, avec Notre-Seigneur, de se nourrir du pain de famille, de s'encourager à persévérer dans les mêmes manières de faire, de penser, de prier. Pour la confession, il faut faire une revue de l'année.

Parlons encore du Manuel. Je désire que tous vous l'ayez et que vous en fassiez usage dans la limite de vos rapports avec les élèves. Je reviens à mes idées, parce que c'est une chose très importante. Il faut un livre, et un livre c'est tout, quand on s'en pénètre et qu'on le fait. Voyez l'Evangile, voyez le peuple juif et la Bible. Chacun, dans ses différents rapports avec les élèves, s'inspirera des pensées du Manuel: pour les avis à donner en confession, en direction, que ce soit là le fonds. Tant que l'aiguille de la boussole n'a pas trouvé le pôle, elle n'est pas stable, elle erre à l'aventure. Que ce soit là le pôle. Il faut que grâce à nous les élèves comprennent et apprécient le Manuel. Cela fait aller au paradis. Un livre, cela détermine une vocation, cela prépare les grandes grâces de l'avenir. Je désire qu’on attache à cela une importance extrême tant pour la prière, la direction à donner, la préparation aux sacrements, que pour les idées à inculquer aux jeunes gens. Il est court, mais il serait encore plus court, qu'il pourrait renfermer la matière suffisante pour faire du bien. Je désire qu'on écrive ce que je dis là du Manuel et qu'on l'envoie à toutes les maisons. C’est ma volonté, qu'on l’exécute.

Le Directoire est la base de notre vie; il faut que le Manuel soit la base de la vie de nos élèves. Que les bons élèves le pratiquent, que les médiocres tâchent d'y arriver, que les moins bons le respectent. Ils ne deviendront pas des êtres insignifiants et fades. Le livre est un excellent moyen d’arriver à faire quelque chose de bon dans l'éducation. C'est la base de l’enseignement, de la direction, qu’il est très facile à faire aimer, surtout quand ce n'est pas un livre ordinaire, qu’on met entre les mains des enfants. Le bon Dieu bénira ceux qui feront ce que je dis, il sera avec eux. Qu'on le fasse, je le répète, car je regarde cela comme d'une grande importance.