Chapitres pour les Oblats 1873-1899

      

Le Directoire et le Manuel

Chapitre du 2 octobre 1886

Voilà une année nouvelle qui va commencer. Il faut nous mettre de tout cœur à toutes nos obligations religieuses. La première, c’est le Directoire. Pratiquons le Directoire affectueusement, comme quelque chose qui nous lie à Dieu, qui nous unit à lui. Il faut nous y attacher. Il faut aimer d'amour toutes ces pratiques: si nous les aimons, elles ne nous fatigueront pas.

Ce sont les pratiques du Directoire qui ont formé saint François de Sales. Cette méthode est donc bonne et il faut nous y attacher. J'ai souvent entendu dire à des personnes du monde que telle ou telle méthode, donnée au confessionnal, les aidait beaucoup. À plus forte raison trouverons-nous aide dans cette méthode que nous donne notre saint Fondateur. Et puis c’est un lien qui nous unit tous les uns aux autres. Quand tout le monde fait la même chose, il y a une force inconcevable dans cette union. Il serait bien à désirer que nous eussions un livre écrit dans ce genre, et propre à être mis entre les mains de tout le monde. Cette doctrine de saint François de Sales se répandrait et ferait grand bien. Oui, des livres s’adressant à toutes les catégories seraient bien désirables. Les jeunes gens ont déjà leur Manuel du jeune homme d’après saint François de Sales, par le P. Deshairs (Saint-Ouen, à l’École Sainte-Anne, 1891. Il faut le faire valoir, ce petit livre. C’est énorme l’influence qu’on peut exercer avec un livre. Voyez les Exercices Spirituels. C’est un livre bien simple et dans lequel au premier abord il n’y a rien de bien extraordinaire. Et quelle influence il a exercée et exerce encore!

Voyez le Directoire, qu’est-ce qu’il y a dans ce petit livre? Faites valoir ce peu, mettez cela en exercice, et vous obtiendrez un résultat immense: “J’ai peur de l’homme d’un seul livre”  [“Timeo hominem unius libri”]. Faites valoir aussi le Manuel. Qu'il devienne le directoire des enfants et des jeunes gens. Il faut que nous nous obligions à tirer de ce livre ce que les Jésuites ont tiré des Exercices Spirituels. On a composé sur les Exercices plus de cent mille ouvrages. Prenons aussi le Manuel pour notre base. Pénétrons-en bien le sens, façonnons à son aide l'âme de nos élèves. Quand chacun s’individualise, chacun ne fait plus que la besogne d'un simple particulier. Mais que chacun s'imprègne de son livre, de la doctrine de ce livre, qu’on s’en pénètre et qu’on l’applique, alors on n’est plus isolé. Toute espèce d’aperçus, de lumières nous surviennent, on arrive à la perfection. Que tous les religieux s’obligent à comprendre cela, à le pratiquer, à le faire observer autour d’eux et leur force d’action sera incalculable.

Qu’est-ce qui fait la force des peuples d’Orient, de cette multitude de gens qui suivent l’Islamisme? Le Coran. Analysez le Coran, vous y verrez cinq à six vérités. Mais c’est le livre et c’est une puissance irrésistible. Que le Manuel soit donc notre cadre. Si nous avons d’autres idées, c’est bien, mais rattachons nos idées personnelles à ce fonds, étayons-les sur cette base. Que ce ne soit plus qu’un rayonnement du livre, une application plus complète, mais qui s’appuie sur ce fonds. Il est à désirer que nous ayons tous notre Manuel et que nous nous appliquions à nous en pénétrer. Embrassons donc avec foi toutes nos obligations religieuses et nous ne marcherons pas sur un sol mouvant, nous serons d’aplomb partout, nous ne ferons pas de faux pas.

Pour l’oraison, faites-la bien fidèlement et suivant la méthode qui vous a été donnée et que je vous confirme. Si vous méditez sur un mystère, que ces considérations aboutissent toujours aux affections, à l’union du cœur et de la volonté avec le Sauveur .

Pour la visite au Saint-Sacrement, je vous conseille bien, si vous êtes distrait, si vous ne trouvez rien à dire à Notre-Seigneur, de vous servir des visites de saint Liguori. C’est un petit livre qui peut produire un très grand bien. Il y a là un grand nombre de citations des Pères, il y a pour nous beaucoup à prendre là certainement. Les fidèles se trouvent bien de ce livre, c’est un de ceux qu’il faut conseiller. Saint Alphonse de Liguori a ranimé la piété dans le sud de l’Italie avec son petit livre. Appliquons-nous bien à la présence de Dieu. Est-ce à dire qu’il faille avoir la pensée continuelle de Dieu ? Non, il suffit d’agir pour lui, de vouloir lui être agréable. Quand nous avons fait notre direction d’intention, si même il survient des mouvements naturels, nous avons agi en présence de Dieu. Il est facile d’avoir la pensée de Dieu fréquente au milieu des occupations de la journée, c’est ce qui les rendra bonnes, fructueuses, puissantes sur les âmes.

N'oublions pas l'examen d’avant midi, cinq ou six minutes seulement, en disant le Confiteor. C’est un moment de silence, de recueillement, qui met notre âme dans la liberté et l'union à Dieu pour le reste de la journée.