Chapitres pour les Oblats 1873-1899

      

Le jeûne

Chapitre du 12 février 1880

Notre Père nous parla du jeûne du carême. Nous ne pouvons pas l'observer en raison de notre condition de professeur, mais cette impuissance est en soi fort regrettable. Nous devons croire à ce que l'Eglise veut, nous devons croire à ce que 1'Eglise a ordonné. Si les circonstances où nous nous trouvons nous rendent le jeûne impossible, ce doit être néanmoins une doctrine de la congrégation que l'Eglise a raison, toujours raison, et que le jeûne est profitable non seulement à notre âme, mais aussi à notre corps. Les médecins généralement prescrivent le jeûne, parce que beaucoup veulent qu'on se nourrisse de viande, comme aliment principal et indispensable, ce qui est contraire à l'Esprit-Saint. Mais nous, n'ayons pas confiance comme eux en de telles choses, mais en Dieu, en son ordre, en l'expression de sa volonté. Ayons cette confiance surnaturelle dans nos maladies. Etendons-la aussi aux sacramentaux, car jamais, en ces sortes de choses, elle ne saurait être trop grande. Disons comme les saints:.”Je n’ai jamais recouru en faveur de mon corps à des médicaments d’ici-bas”- [“Medicinam carnalem corpori meo nunquam adhibui”].

Enfin, ayons soin de suppléer au jeûne; c’est l’intention formelle de l'Eglise. Si elle dispense, c'est une concession qu'elle nous fait, mais à la condition que nous y suppléerons. Voilà pourquoi elle rend l'aumône obligatoire en carême. Or l'aumône coûte. Il faut donc que nous nous tenions comme rigoureusement obligés de faire en carême quelque chose de plus que ce que nous faisons en temps ordinaire. Tous les ordres religieux se resserrent plus que jamais dans leur observance. Ainsi, nous devons nous rappeler souvent que nous sommes en carême. Si, par exemple, nous nous laissons aller à un peu de paresse le matin en nous levant, redoublons d'énergie afin de nous surmonter. Au réfectoire, pratiquons plus exactement la mortification. Entrons généreusement, joyeusement, dans cette sainte quarantaine; allons-y sans regarder en arrière. Que dans nos confessions, l'examen ne porte pas seulement sur les commandements, mais voyons encore en détail, quelles ont été nos défaillances, nos irrésolutions. Voyons si nous avons été fermes et invariables. Attachons-nous aux pas de notre bon maître, qui a jeûné et a eu faim. Aimons- le, non pas seulement d'un amour affectif — c’est déjà beaucoup — mais surtout d'un amour effectif, qui recueille avidement toutes ses paroles sans en laisser perdre aucune, qui les accomplit à la lettre. Consolons-le ainsi des oublis, des froideurs, des outrages qu'il endure chaque jour. A lui, gloire et honneur dans tous les siècles.