Chapitres pour les Oblats 1873-1899

      

La charité cordiale

Chapitre du 4 septembre 1879

Notre Père, nous voyant réunis plus nombreux qu'à l'ordinaire, nous parla des rapports que nous devons avoir les uns avec les autres. Nous ne devons pas oublier que saint François de Sales voulait établir sa congrégation sur le seul lien de la dilection, sans l'obligation des vœux. S'il n'a pas pu le faire, du moins l'esprit dans lequel il voulait faire ainsi doit rester. Il savait bien et il disait que le religieux qui accomplirait parfaitement ce seul point arriverait à une très haute sainteté, parce qu'il accomplirait toute la loi.

Nous devons nous traiter avec cordialité, éviter tout ce qui pourrait blesser tant soit peu notre frère. Nous devons nous traiter avec respect. Il faut que nos rapports mutuels soient sous le regard de Dieu. N'oublions pas cela dans tout ce que nous faisons, jusque dans notre manière de donner un objet ou d’en recevoir. Nous sommes prêtres ou au moins religieux, nous sommes tous consacrés à Dieu, et comme tels nous devons honorer les uns dans les autres l'ordre auquel nous appartenons, puisque Dieu honore cet ordre en lui donnant des anges gardiens plus nombreux, en lui préparant au ciel une place d'honneur. Nous commençons par la grâce de Dieu à pratiquer cette charité cordiale, mais il y a des degrés, et nous devons nous efforcer de monter.

Un bon moyen de pratiquer cette charité est la correction fraternelle. Si un frère dit quelque parole qui soit contre la Règle et que nous le voyons préoccupé d’autres choses ou dominé par quelque passion, nous devons le laisser. Mais si nous le voyons retomber souvent dans le même défaut et qu'il paraisse ne pas être éclairé sur ce qu'il fait, il faut le lui dire en toute charité et simplicité. Faut-il le faire devant toute la communauté? Non, mais si on peut le prendre à part, qu'on l'avertisse doucement. Celui qui sera averti ainsi ne se fâchera pas, il se souviendra qu’il en coûte davantage à son frère de l’avertir qu'à lui de recevoir l'avertissement. Qu'il accepte donc en cet esprit l'avertissement, même si celui-ci était un peu sévère, car alors il aurait recours à l'humilité.

Pour pratiquer la charité cordiale, nous devons prier les uns pour les autres. Que les prêtres le fassent particulièrement, prenant l'habitude de nommer quelques-uns de leurs confrères au mémento des vivants. Qu’ils nomment le supérieur, le maître des novices, ceux qui ont les plus grandes charges, qu'ils nomment les uns et les autres, tour à tour. Que tous nous fassions une part dans nos prières, dans nos pratiques. Une nouvelle année scolaire va s'ouvrir. C'est encore une année de travail. Notre vie est une vie de travail. Nous avons à travailler dix mois et souvent encore pendant les vacances. Acceptons bien cela avec une grande générosité, nous souvenant que, en travaillant, nous faisons l’œuvre d'expiation la plus efficace. Nous avons tous des fautes à expier.